Un genre qui séduit

Écrivains, cinéastes, journalistes, nombreux sont ceux qui s’intéressent à ces figures emblématiques, des hommes et femmes qui ont marqué l’Histoire et souvent inspiré notre modèle de société actuel.

Les auteurs de BD, eux aussi, de plus en plus, suivent cette tendance, par la mise en dessins de grands noms, connus ou moins connus, et revisitent ainsi les codes de la biographie telle qu’on l’imagine traditionnellement.

Du livre d’histoire à la bande dessinée

Les livres d’histoire, ceux qui ont accompagné notre scolarité, abordent la découverte des « grands hommes » sous une forme très didactique et conventionnelle, qui sied bien à l’enseignement scolaire. Que de pages entières à apprendre par cœur à l’école !

Les biographies ont la cote. Elles rencontrent, par leur caractère intemporel, un succès considérable auprès des éditeurs et d’un public éclairé. Oui mais voilà, se pose la question de moderniser un genre jusqu’alors associé à de gros pavés parfois indigestes. Surgit un médium que l’on n’attendait pas sur ce terrain : la BD.

Voilà donc nos livres d’histoire remisés au profit d’une lecture en dessins, ludique, divertissante, et qui favorise en même temps la découverte.

La biographie dessinée ou comment s'intéresser autrement

Les lecteurs accros aux BD vont, pour la plupart d’entre eux, voir dans la biographie dessinée une autre BD à engloutir, sans nécessairement se préoccuper de son caractère biographique. C’est la forme qui les intéresse en priorité, plus que le fond.

De son côté, l’amateur d’essais ou de récits biographiques va pouvoir comparer une lecture objective à un médium qui convoque le dessin et un certain parti pris, et va se trouver confronté à un point de vue différent, qui invite à la réflexion.

De cette manière, biographie et BD se rejoignent et se mêlent, se nourrissant l’une et l’autre de leur richesse, en invoquant et en faisant vivre ou revivre des personnages marquants, au parcours souvent atypique et riche en découvertes.

Il y en a pour tous les goûts

On trouve toutes sortes de biographies en bande dessinée : engagées, intimistes, mais aussi humoristiques, et qui concernent des figures très éclectiques.

C’est ici qu’interviennent la sensibilité de l’auteur et son intérêt pour tel ou tel personnage qu’il va mettre en avant, à sa manière,  tant dans la narration que dans le dessin.

Peindre le peintre, tel est le défi relevé par Dori Fabrizio lorsqu’il écrit son roman graphique Gauguin, l’autre monde. Il décide de se confronter à l’un des plus grands peintres du XIXème siècle, en choisissant de ne s’intéresser qu’à la fin de sa vie, période la plus créative de l’artiste. Entre mythe et réalité, l’auteur nous propose un scénario original, mélangeant à souhait flashbacks et présent. Ce faisant, il nous apprend beaucoup sur la vie de cet artiste.

Écrire l’écrivain, c’est le choix de Guillaume Sorel qui, tout comme son confrère, décide de relater dans sa BD Les derniers jours de Stefan Zweig, inspirée du roman éponyme de Laurent Seksik, la fin de vie de l’écrivain, qui, après avoir fui les ravages du nazisme, se retrouve rattrapé par ses démons. Entre doutes, tristesse, colère, cet ouvrage magnifique, dessiné à l’aquarelle, nous retrace avec justesse et lucidité la fin tragique d’un écrivain extrêmement talentueux.

Pendant ce temps-là, Jospéhine Baker, danseuse américaine connue pour son engagement dans la Résistance, remonte sur scène grâce au roman graphique éponyme de José-Louis Bocquet ; lequel redonne également la parole à Olympe de Gouges, polémiste engagée et considérée comme pionnière dans la lutte pour les droits des femmes.

Renaud Huynh, directeur du Musée Curie situé à Paris va se distinguer dans un registre différent, en racontant dans sa BD Marie Curie, la fée du radium, le destin de l’une des scientifiques les plus célèbres du XXème siècle. À côté de cette œuvre, dans les rayonnages d’une librairie ou d’une bibliothèque, on pourra également revivre le destin tumultueux et non moins passionnant d’une figure historique et politique célèbre dans le monde entier : Le révolutionnaire Che Guevara, à travers la bande dessinée Che.

L’histoire de cette bande dessinée est par ailleurs hors normes : après sa toute première publication en Argentine en 1968, suivie d’un fort succès, elle est interdite en raison de la prise du pouvoir des militaires. Ses deux dessinateurs, Alberta Breccia et son fils Enrique ainsi que son scénariste Hector Oesterheld sont victimes de menaces de la part du pouvoir en place. Dès lors, la BD polémique va connaître ce que l’on pourrait qualifier d’épopée : planches brûlées, exemplaires enterrés avant de réapparaître, édition de la BD en Espagne puis en Belgique, avant une première édition française en 2009, soit 41 ans après sa première publication… En définitive, le destin de cette œuvre est à l’image de celui qui en est le sujet : résistante et déterminée. Ce sont parfois les livres qui font l’Histoire.

Les auteurs de bandes dessinées n’ont donc pas fini de nous surprendre en nous montrant l’étendue de leur talent dans des ouvrages variés qui se hissent au rang de la « grande littérature ».

Pour en savoir plus sur ces figures légendaires, la Médiathèque départementale vous propose une sélection de biographies dessinées.

À suivre : Tome 9 : Le manga : Genres, cibles éditoriales, on vous dit tout !