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En attendant les JO : du symbolique au géopolitique

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Quatrième et dernier volet de notre rubrique « En attendant les JO », cet article propose de revenir sur l’histoire des Jeux d’été, aux prises avec la grande Histoire qui, loin de l’idéal de trêve poursuivi par Pierre de Coubertin, est souvent devenue « caisse de résonnance » d’évènements planétaires marquants. Alors même que cette fête sportive, mais aussi artistique et culturelle se voulait vecteur d’ouverture et de meilleure compréhension de l’autre, force est de constater que les aléas socio-économiques et surtout politiques mondiaux, l’auront tout autant impactée que les exploits sportifs.

Photo représentant un drapeau avec les anneaux des JO, logo des JO PARIS 2024, figurines sportives
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Rétrospective synthétique des exploits sportifs légendaires, associés pour toujours à la grande Histoire.

1936 : à Berlin les quatre médailles d’or de Jesse Owens, aux 100 mètres, 200 mètres, saut en longueur et relais 4 x 100 mètres, mettent à mal les théories raciales nazies sur la prétendue supériorité de la race aryenne et consacrent pour toujours la performance de l’athlète Afro-américain ; en 1940, la planète s’embrase et la flamme s’éteint. En pleine deuxième guerre mondiale, les jeux de Tokyo sont annulés.

1948 : Londres prend la relève de l’après-guerre. Alors même que l’on ne compte encore qu’une femme pour dix hommes qualifiés,  deux  femmes se distinguent : Micheline OsterMeyer, figure française atypique marque les jeux en alliant une carrière de pianiste virtuose et deux médailles d’or aux lancers de poids et de disques, illustrant la parfaite réunion du corps et de l’esprit, chère au Baron de Coubertin. Fanny Blankers-Koen (Pays-Bas), connue sous le nom de la "maman volante", remporte quatre médailles d'or en athlétisme (100 m, 200 m, 80 m haies, relais 4 x 100 m).

Les années 50 marquent le début de la guerre froide et la première participation des athlètes russes en 1952 à Helsinki. Aussitôt la razzia des lanceuses soviétiques et les trois victoires en or du Tchécoslovaque Emile Zatopek pèsent lourd dans le décompte final de la guerre des médailles entre les deux géants USA /URSS. En 1956, aux Jeux de Melbourne, en écho aux répressions sanglantes de Budapest par les soviétiques quelques mois plus tôt, les Hongrois ridiculisent l’équipe d’URSS et battent la Yougoslavie pour devenir champions olympiques.

Rome en 1960 et Tokyo en 1964 redonnent confiance en l’avenir. En pleine décolonisation, 15 nouvelles nations intègrent les Jeux. Parmi elles, l’Ethiopie qui affiche son émancipation grâce aux médailles olympiques remportées par Abébé Bikila à l’épreuve reine du Marathon.

Les Jeux de Mexico en 1968 et Munich en 1972 entérinent le rôle de tribune politique des J.O. : la dénonciation  du non-respect des droits civiques des Noirs américains via le point levé ganté de noir des athlètes Tommie Smith et John Carlos (vainqueurs de l’argent et or) sur le podium du 200m, paraît bien pacifiste au regard des actes de violence perpétrés quatre ans plus tard à Munich. La prise en otage d’athlètes israéliens par un commando palestinien ensanglante les J.O.de Munich et fait quasiment oublier les sept médailles du nageur américain Mark Spitz.

1976 : alors que Montréal s’endette pour 30 ans en raison de l’inflation, de grèves à répétition et de rêves démesurés, Nadia Comăneci déboussole les instruments de mesure en effectuant le programme parfait aux barres asymétriques et obtient le premier 10/10 de l’histoire olympique.

Années 80 : les Jeux entrent en turbulence et n’échappent plus du tout aux politiques intérieures ou internationales. Les États-Unis et l’URSS boycottent respectivement les Jeux de Moscou en 1980 et Los Angeles en 1984. Alors qu’en territoire soviétique, l’anglais Sébastian Coe s’adjuge quatre médailles olympiques aux principales épreuves de demi-fond, quatre ans plus tard l’américain Carl Lewis rejoint son aîné Jesse Owens en remportant à nouveau les quatre médailles d’or aux 100 mètres, 200 mètres, saut en longueur, relais 4 x 100 mètres.

La décennie 1988-1998 convoque sponsoring, merchandising et droits audiovisuels. Malgré le scandale de l’attribution truquée des Jeux d’hiver à Salt Lake City et celui du dopage de Ben Johnson lors de la finale du 100 m en 1988 à Séoul,  la gestion de Juan Antonio Samaranch, Président du CIO, redynamise les Jeux longtemps déficitaires. La devise Citius, Altius, Fortius est appliquée au sport comme au commerce.

En 1992, Barcelone dans un monde en pleine mutation rend aux Jeux leur vocation universelle. La fin de l’Apartheid, la réunification des deux Allemagnes, le défilé des Républiques soviétiques sous une même bannière, mais aussi la présence de l’Algérie en proie à la montée de l’intégrisme islamique sont autant de symboles rehaussant les valeurs de l’Olympisme. La planète assiste alors au sacre retentissant de l’Algérienne musulmane Hassiba Boulmerka, médaille d’or du 1500 m. Et en 1996 à Atlanta, la championne française Marie-José Pérec remporte l’épreuve finale du 200 mètres et du 400 mètres, doublant sur cette dernière épreuve une médaille d’or déjà obtenue à Barcelone.

2000, Sidney : Cathy Freeman, symbole féminin de la nation aborigène et rivale de Marie José Pérec, remporte l’or olympique sur 400 mètres, redonnant enfin la place qu'ils méritent aux premiers habitants de l'Australie.

2004, Athènes : les 6 médailles du nageur américain Michaël Phelps, ne font pas oublier la banqueroute, la déshérence d’installations à l’abandon et la crise financière et économique grecque qui suivra l’organisation des Jeux sur leur terre d’origine.

2008, Pékin s’empare des performances sportives de ses athlètes pour mieux asseoir sa puissance. Les manifestations de soutien au Tibet, annexé par la Chine, secouent les valeurs olympiques, mais n’empêchent pas le pays de porter la flamme au sommet de l’Everest et de finir 1er au classement des nations en nombre de médailles. Les plongeurs et plongeuses de haut vol remportent à eux seuls 7 médailles d’or.

Durant la décennie 2010, tandis que le monde amorce une phase de décroissance et de prise de conscience climatique, le Comité International Olympique se développe et diversifie les sports olympiques selon qu’ils sont télégéniques ou générationnels. Il donne également toute sa place aux Jeux Paralympiques. Mais malgré sa volonté affichée d’économie, notamment d’énergie,  Rio en 2016 demeure déficitaire à l’issue des Jeux.

Déjà médaillé d’or à Pékin en 2008, le Jamaïcain Usain Bolt domine de sa foulée de 3 mètres les Jeux de Londres en 2012 et de Rio en 2016 lors des épreuves de sprint. « Bolt la Foudre » comme on le surnomme, court à 44Km/h et compte parmi les athlètes les plus titrés de l'histoire des J.O. avec huit médailles d'or.

Contraint d’annuler les Jeux en 1940 en raison de la guerre mondiale, Tokyo 2020 est repoussé en 2021 en raison de la crise sanitaire mondiale du COVID 19. Privés de gradins, trois milliards d’êtres humains se pressent alors devant les écrans, prouvant s’il en était besoin, l’engouement planétaire pour l’évènement.

Enfin, le 14 juillet 2024 a marqué le coup d’envoi des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris. Après un long périple à travers la France, la Flamme Olympique est arrivée dans la capitale. Cette dernière a posé les bases d’une stratégie de sobriété et durabilité  ambitieuse* qui engage dans le même temps Mouvement olympique et protection de la planète. Dotant ainsi définitivement les J.O. d’un enjeu environnemental, sans doute plus difficile à atteindre encore, que la victoire au 50 m nage libre de Florent Manaudou, ou de Léon Marchand au 400 m x 4 nages.

L’évènement est déjà inévitablement soumis aux récurrents rapports de force géopolitiques. Va-t-il pouvoir répondre aux missions originelles du Mouvement olympique alors que les tensions internationales sont à leur plus haut niveau ? La quinzaine à venir nous le dira.

*[Les Jeux de Paris sont  les premiers Jeux alignés sur l’Accord de Paris pour le Climat signé par 195 pays en 2016. Ainsi, l'empreinte carbone de l’évènement sera réduite de 55 % en comparaison avec ceux de Londres.]

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